
Antananarivo, la capitale malgache, reste sous tension après une journée de manifestations et de pillages qui ont secoué la ville jeudi. Le président Andry Rajoelina a annoncé vendredi le limogeage de son ministre de l’Énergie, dans un contexte de coupures récurrentes d’électricité et d’eau, afin de répondre à la mobilisation populaire, tout en maintenant un deuxième couvre-feu nocturne pour tenter de contenir les violences.
Le mouvement de protestation, largement relayé sur les réseaux sociaux sous le nom de « Gen Z », appelle à une nouvelle manifestation samedi, promettant un défilé pacifique de l’université d’Antananarivo jusqu’au quartier central d’Ambohijatovo. Les organisateurs se distancient des pillages et mettent en avant des revendications liées aux pénuries d’eau et d’électricité, symptôme d’infrastructures énergétiques et hydriques fragiles. Le recours à des symboles internationaux, comme le drapeau pirate inspiré de la série japonaise « One Piece », illustre une stratégie de mobilisation globale, visible également dans d’autres mouvements de contestation régionaux.
Les tensions politiques et sociales révèlent des fragilités structurelles dans un pays où l’économie peine à retrouver une dynamique soutenue. Madagascar dépend fortement de l’agriculture et du tourisme, secteurs sensibles aux crises climatiques et aux chocs politiques. Les interruptions régulières des services publics essentiels, combinées à la hausse du coût de la vie, aggravent la perception d’une gouvernance inefficace et contribuent à la radicalisation de certains mouvements civiques.
Sur le plan démocratique, ces événements interrogent la résilience des institutions. Le président Rajoelina, arrivé au pouvoir en 2009 à la suite d’un coup d’État populaire, qualifie les manifestations de jeudi de « préméditées » et les assimilent à des actes de déstabilisation. Cette rhétorique met en lumière les tensions entre la légitimité populaire et la stabilité institutionnelle, au moment même où des jeunes générations, via des plateformes numériques, cherchent à faire entendre leur voix dans l’espace public.
À l’échelle nationale, les couvre-feux concernent cinq grandes villes, tandis que les affrontements ont déjà fait des victimes, notamment à Antsiranana où des étudiants ont défilé avec le corps d’un camarade tué. La situation souligne la nécessité pour Madagascar de concilier croissance économique, modernisation des infrastructures et renforcement d’une gouvernance démocratique capable d’apaiser les tensions sociales. Le pays se trouve à un carrefour où les enjeux économiques et politiques se mêlent, révélant la fragilité et le potentiel de son développement à long terme.









