Le général-major Évariste Somo Kakule a été nommé gouverneur militaire de la province du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), en vertu d’une d’ordonnance présidentielle lue mercredi à la télévision nationale et relayée par l’Agence congolaise de presse (ACP / Officielle).
« Est nommé gouverneur militaire de la province du Nord-Kivu, le général-major Somo Kakule Evariste. Sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à la présente ordonnance », rapporte l’ACP.
En vertu d’une précédente ordonnance présidentielle, Évariste Somo Kakule a été élevé au rang de général-major, indique la même source.
Evariste Somo Kakule succède au général-major Peter Cirimwani, décédé jeudi 23 janvier, après avoir été touché par balle, près d’une ligne de front à proximité de Sake, située à seulement 27 kilomètres de la ville de Goma.
« Il est tombé l’arme à la main au champ d’honneur. Il a été blessé. On l’a évacué et tout a été fait pour qu’il arrive à Kinshasa et qu’on l’achemine pour des soins appropriés à l’extérieur du pays. Malheureusement, il a succombé à ses blessures », avait alors annoncé l’armée congolaise.
Le décès de l’ancien gouverneur militaire du Nord-Kivu et la nomination du général-major Évariste Somo Kakule interviennent alors que le groupe armé rebelle M23 a pris d’assaut la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu.
Sur le terrain, la situation sécuritaire demeure confuse et les autorités congolaises n’ont jusqu’à présent pas donné de bilan humain. La ministre congolaise des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba Wagner, a déclaré mardi au Conseil de sécurité de l’ONU que plus de 100 personnes avaient été admise dans des centres de santé ces derniers jours, que plus de 500 000 personnes avaient été déplacées et que la situation humanitaire s’était encore détériorée.
La cheffe de la diplomatie congolaise a haussé le ton face à la prise d’assaut de la ville de Goma, estimant que « si ce conseil (Conseil de sécurité, NDLR) échoue, la rue va s’en charger ». « Et comme vous le savez très bien, la rue n’a pas d’ordre ni de tempérament. L’indifférence n’est plus une option. Ce conseil ne peut se permettre d’être passif », a-t-elle lancé.
L’Organisation des Nations Unies a, pour sa part, averti, dans un article rendu public mardi sur son site officiel, d’une crise humanitaire et des droits de l’homme à Goma.
Prudente quant à la confirmation de la prise de la ville par les rebelles, l’ONU reconnaît que l’aéroport est déjà contrôlé par le M23 et que l’ordre public était en cours d’effondrement. « À notre connaissance, les forces du M23 contrôlent l’aéroport et il existe un risque réel d’effondrement de l’ordre public dans la ville, compte tenu de la prolifération des armes », a déclaré Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, lors d’un point de presse à New York, relayé dans le document.
La ville étant désormais isolée, « les civils sont confrontés à des risques graves, notamment en raison de l’utilisation d’armes explosives telles que des mortiers et de l’artillerie lourde dans des zones densément peuplées », a pour sa part averti Volker Türk, chef des droits de l’homme de l’ONU.
Le responsable onusien a également averti des risques pour l’ordre public, suite à l’évasion de quelque 4 763 prisonniers de la prison de Muzenze, dans la foulée des événements.
Le Mouvement du 23 Mars (M23) a été créé en 2012 par des militaires dissidents de l’armée congolaise. Après une brève montée en puissance, il a été défait en 2013 par les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), appuyées par les Casques bleus de la MONUSCO. Cependant, le M23 a repris les armes en 2022, s’emparant de plusieurs localités dans la province du Nord-Kivu, située à la frontière du Rwanda et de l’Ouganda.
Kinshasa accuse le Rwanda de soutenir activement le M23 pour accéder aux richesses minières de la région. Ces accusations sont étayées par des rapports d’agences onusiennes, qui pointent un appui militaire rwandais au mouvement rebelle. Pour la RDC, le M23 est un groupe « terroriste » et toute forme de négociation est catégoriquement rejetée.
Le Rwanda réfute ces allégations, affirmant que le M23 est un mouvement congolais dirigé par des Congolais, bien que ses membres parlent le kinyarwanda, la langue rwandaise. Kigali rejette également les conclusions des rapports onusiens et rappelle avoir désarmé les rebelles du M23 qui s’étaient réfugiés sur son sol en 2012-2013, avant de remettre leur arsenal aux autorités congolaises.
Pour Kigali, « la question du M23 est une menace sécuritaire pour le Rwanda ». « La RDC, à cause de l’assimilation permanente du M23 au Rwanda, a bâti une large coalition militaire avec des soldats burundais, avec des mercenaires européens, des miliciens Wazalendo et des génocidaires FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda, NDLR) », avait soutenu le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Jean Patrick Nduhungirehe, dans une interview accordée à Africa 24.
Ces alliances, selon Nduhungirehe, s’inscriraient dans une stratégie visant à renverser le gouvernement rwandais.
anadolu