Avant l’aube, la police sanitaire armée de pinces et d’un bulldozer s’est mise à démolir les étals de commerçants de fortune qui encombraient les rues du centre-ville de la capitale de la République démocratique du Congo avant une visite de quatre jours du pape François à partir du 31 janvier.
Les responsables disent que Kinshasa, une vaste ville pauvre de 17 millions d’habitants, fait peau neuve non seulement pour honorer le pape, mais pour rendre ses rues et ses trottoirs plus propres et ordonnés même après son retour à la maison. Mais les petits commerçants expulsés protestent que leurs moyens de subsistance sont détruits dans le processus.
« Le nettoyage que nous faisons en ce moment n’est pas seulement dû à la venue du pape« , a déclaré George Ya Lala, coordinateur de la campagne pour la ville de Kinshasa, ajoutant que l’opération se poursuivrait même après le retour du pape.
Interrogée sur les expulsions de commerçants, la nonciature apostolique, la représentation diplomatique du Vatican à Kinshasa, a déclaré à Reuters dans un SMS qu’elle n’était pas au courant des opérations de nettoyage et n’y avait pas participé.
Il précise que le Vatican a seulement demandé que les préparatifs de la visite de François se fassent « de la manière la plus sobre. Nous souhaitons évidemment que les sites d’accueil puissent accueillir le plus grand nombre de fidèles de manière sécurisée et que les routes soient sécurisées« .
Debout sur le côté avec un visage enflé après sa chute alors qu’il se débattait avec la police dans un effort infructueux pour sauver ses marchandises, le vendeur d’accessoires téléphoniques David Mbemba, 19 ans, a déclaré qu’il avait perdu environ 100 500 francs congolais (50 $) de marchandises.
D’autres vendeurs comme Jean Mbuyu ont dit qu’ils avaient tout perdu parce qu’ils n’avaient pas été prévenus du nettoyage.
Ya Lala a contesté cela, affirmant que les commerçants avaient été avertis à plusieurs reprises de déménager avant que la police n’intervienne, laissant une traînée chaotique d’épaves alors qu’ils détruisaient étal après étal, avec des foules de commerçants, de famille et d’amis regardant avec consternation.
MOYENS DE SUBSISTANCE PERDUS
Les moyens de subsistance de nombreuses familles au Congo dépendent du soi-disant secteur informel de l’économie – étals de rue, kiosques et colporteurs vendant une multitude d’articles, notamment de la nourriture et d’autres articles ménagers de base.
« Je suis veuve. Je dois payer mon loyer, les frais de scolarité de mes enfants… Je vais maintenant mourir de faim« , a déclaré Marth Kayunga, un vendeur du marché informel situé dans l’une des rues latérales du boulevard Lumumba ciblé par la brigade de police sanitaire.
« Nous savions que cette opération consistait à nettoyer le boulevard Lumumba avant la visite du pape que nous attendions tous« , a déclaré Jesus, un propriétaire de quincaillerie qui n’a donné que son prénom.
« Nous sommes surpris que la police vienne dans les petites rues parce qu’ils nous ont dit qu’ils allaient simplement enlever les débris de l’avenue principale. Ce n’est pas juste« , a-t-il déclaré, ajoutant que son magasin avait également été démoli.
Un porte-parole de la police a seulement déclaré qu’ils travaillaient sous les directives du gouverneur régional de Kinshasa et des autorités municipales telles que Ya Lala, qui était avec la police sur le terrain pour diriger l’opération.
Le boulevard Lumumba est l’artère principale menant à l’aéroport, où un gala de bienvenue sera organisé pour le pape François. Les autorités avaient prévenu que des travaux d’aménagement seraient effectués sur les sites où le pape sera reçu.
Mais le prêtre de l’Église catholique, le père Victor Ntambwe, a déclaré que les autorités auraient pu planifier mieux et plus longtemps pour l’occasion.
« Faut-il attendre la visite du pape pour faire quelque chose comme ça ? Je ne suis pas sûr qu’il faille attendre l’arrivée du pape pour commencer à dégager les avenues et chasser les vendeurs de rue« , a déclaré Ntambwe.
Reuters
