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Côte d’Ivoire: l’acteur-producteur Sidiki Bakaba se dit « heureux d’être de retour après 7 ans d’exil»

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Son Excellence Sidiki BAKABA Acteur, Metteur-en-scène , Réalisateur, nommé Ambassadeur de Côte d’Ivoire pour la Culture par décret Presidentiel le 2 Octobre 2010.

Par un pur hasard nous avons mis la main sur Sidiki Bakaba, l’icône du 7ème art ivoirien à l’aéroport à Orly (Paris) alors qu’il s’apprêtait à prendre son vol. Notre matraquage téléphonique une fois à Abidjan, a fini par lui tirer des mots. Il se prononce sur l’actualité et surtout, sur le devenir du cinéma ivoirien. Entretien.

Que nous vaut cette échappée sur les bords de la Lagune Ebrié ?

Ce qui fait actuellement mon bonheur, c’est cette liberté que j’ai de faire des allers et retours à Abidjan. Après mes 7 années d’exil, je suis aujourd’hui fier et heureux de retourner au bercail à l’occasion d’un colloque international qui se déroule ici à Abidjan. Ces è ann »es de mon axil ont été très dures et pénibles pour moi mais, ces années ont également constitué ma chance d’être approché par le producteur de la série Ôbatanga, M. Alex Ogou. Et come il n’y a jamais deux sans trois ou un sans deux, je suis encore là pour la deuxième saison de cette même série Ôbatanga. Dans la première saison, j’étais ministre de l’énergie et pour celle-ci qui est présentement en chantier, je suis premier ministre donc, je commence à grandir aussi dans l’histoire pour le bonheur de cette série qui d’ailleurs, été primée le 9 juillet dernier.

Je profite de l’occasion pour vous faire remarquer que j’ai d’ailleurs eu le privilège d’aller recevoir ce trophée. Et c’est pourquoi, j’ai fait venir avec moi, Alex Ogou et Olivier Rabatel qui ont été très géniaux dans la fabrique de ce succès. En fait, c’est le même tandem. Des jumeaux dirais-je, sauf qu’il y a un qui est plus Blanc que l’autre. Vous ne le savez peut-être pas. Dans notre métier, on rencotre des gens et très peu de personnes.Or, c’est cette qualité à avoir de l’intérêt pour des personnes qui a été le plus frappant pour moi lorsque j’ai pris contact avec cette équipe que j’ai rencontrée. Un Blanc aussi africain que l’autre. Et Alex plus Noir que Blanc. Je disais à la première saison que c’était la première fois que je vois une équipe de ce genre où tout le monde est excellent et où, tous sont Africains de A à Z.

Dans tous les films où j’ai tourné en qualité d’acteur, c’est des américains ou des français qui sont généralement des techniciens. Par contre ici, c’est différent avec une équipe entièrement panafricaine. Le scenario est d’un camerounais. Il en est de même du maquillage, de la lumière ou de la photographie. Vraiment, il n’y a rien à dire. C’est pourquoi j’ai été émerveillé au point d’éprouvé une grande fierté. Finalement, c’est tout cela qui me rend très heureux de revenir dans mon pays. Et j’espère y revenir encore pour toute la troisième saison.

Pour qui connaît ta riche filmographie, n’est-ce pas une case en dessous que de jouer dans une série télé?

On a vu des grands acteurs du cinéma dans des séries. Je pense par exemple à Gérard Depardieu. Il faut comprendre que aujourd’hui, les séries commencent à prendre de plus en plus d’importance aussi bien en Occident que dans le reste du monde et plus particulièrement en Afrique car, certains ont tendance à penser que le théâtre c’est un pas vers le cinéma. Pour d’autres, le théâtre vaut bien plus que le cinéma. Parce qu’ils considèrent que l’aristocratie de cet art est plus direct avec le public, ce qui n’est pas le cas pour le cinéma où l’on peut faire jouer un singe, un bébé, etc. Pour eux le cinéma est un art en dessous du théâtre.

Les grands comédiens d’une certaine génération n’en voulaient jamais. Vous avez Gérard Philippe qui sont des grands et excellents au théâtre et au cinéma. D’autres peuvent vous démontrer le contraire. J’ai eu le privilège de faire du grand théâtre et la chance de jouer avec des grands réalisateurs de films cultes qui vous suivent tout au long de votre carrière. Car vous pouvez faire cent films mais, il y a toujours un ou deux qui marquent votre carrière.

La fureur de vivre de James Huddin ou A Bout de Souffle de Belmondo. Le Camp De Thiaroye de Sembène Ousmane ou Bako L’Autre Rive en ce qui me concerne. En clair ce n’est pas une chute pour moi. J’aime les challenges. Au contraire, j’aime travailler avec la nouvelle génération. Et chaque fois que je suis devant la camera d’un réalisateur qui a l’âge de mon fils, c’est que mon art rajeuni. Mon avenir est derrière moi.

Ce que je dis à mes étudiants, c’est que vous n’êtes jamais plus grand qu’un réalisateur qui est beaucoup plus jeune que vous. C’est à ce moment là qu’il vous demandera des choses que vous n’avez jamais faites. Tu rajeunis avec la fraicheur qu’il rapporte. Et comme j’avais déjà vu un film de lui lors d’un festival, j’ai tout de suite apprécié. Et lorsque j’ai été contacté pour la série Cacao, j’ai dit non pour des raisons de santé de mon épouse. Et quand il m’a à nouveau contacté pour Obatanga, elle m’a dit « TU Y VAS ». Et ça donné ce que vous avez vu et ce que vous verrez aussi.

Qu’en est-il de ce gros projet de renaissance de l’Actor Studio ivoirien ?

La mère de mon épouse, juive et fille de rabbin et ma mère fille de Cheick Fantamadi Cherif de Kankan toutes disaient si Dieu veut. Et je vis avec cette notion. Il y a des choses qui arrivent et auxquelles vous ne vous attendez pas qui surviennent. Sans que vous ne vous y attendiez. J’étais avec des initiateurs de la NISA de Patricia Kalou où j’ai été agréablement surpris d’être invité par M. Aka à son université UIA. Il m’a indiqué qu’il a toujours suivi dans ce que je faisais et m’a encouragé pour tout ce que je faisais pour mon pays. Puis il a ajouté « les comédiens que vous avez formés dans ce pays sont des lauréats partout, ils glanent des prix. Je ne peux laisser cela mourir, j’ai donc décidé de t’inviter à faire renaitre de centre ici l’actor Studio Actor Studio Sidjiri Bakaba ». il y avait un espace magnifique sur le toit, théâtre, salle polyvalente, et il a souhaité que cela s’appelle Ayala Bakaba.

Et comme je venais de perdre mon épouse j’étais profondément marqué par ces évènemements. Je venais d’être honoré par Tanguy Blais et Patricia Kalou et cette infirmation qui venait de tomber, ça faisait vraiment un choc émotionnel terrible. L’Actor Studio va renaitre. Aussi, le Seigneur m’a permis de comprendre et de saisir tout de suite ce que j’en ferais. Et sur scène je voyais sur scène Maoula, Mike Danon, Assi Gbessi qui d’ailleurs vient de remporter le Pharaon d’Or en Egypte ce qu’un africain ni même moi n’a jamais obtenu.

Tactiquement où en est-on ?

Je reviens dans un mois pour poser les balises de ce projet. Et même si je ne serai pas là pour animer ce cinéma, j’ai formé des gens sûrs. Mon projet c’est de former des gens qui viendront de toute l’Afrique.

Que des Européens se rendent à Abidjan et vice versa…

Au palais de de la culture, j’ai eu à former des canadiennes, des belges, des françaises etc. qui jouaient des femmes africaines. Comme nous avons été formés à jouer les Blancs. Ce n’est plus la couleur qui compte, c’est l’âme humaine que l’acteur est appelé à incarner quel que soit le rôle. Si je veux jouer le chinois je n’ai pas besoin d’être natif de la Chine. Nous n’avons pas réussi à boucler l’opération mais je pense qu’avec l’Actor Studio version IUA, nous y arriverons. Il faut donc faire des partenariats avec des pays qui enverront des étudiants par quinzaine pour former.

Des étudiants rigoureusement sélectionnés dans la sous région Mali, Burkina etc. par mes anciens étudiants durant deux ans et prendre les meilleurs d’entre eux. Eux au moins, n’auront pas à passer 10 ans avec moi comme mes étudiants qui ont eu la chance d’avoir un professeur durant 10 ans. Celui-là ne sera pas assis dans un fauteuil mais, qui est sur scène. C’est ce qu’ils ont eu comme méthode de formation. Voici d’ailleurs une (l’actrice Cécilia Pango) dont je suis fier. Laurenne Koffi. Des comédiennes talentueuses. On n’a pas souvent parlé des femmes parmi mes étudiantes. Mais elles sont aussi talentueuses si vous vous souvenez de la pièce Il Nous Faut l’Amérique de Koffi Kwahulé.

Que doit –on retenir ?

Au total, j’ai eu la chance de recevoir ce que je leur ai donné. C’est –à-dire ne jamais se dire que vous êtes grand acteur ou au dessus de tous. Et si quelqu’un vous le dit dites-vous, c’est une dette. Vous aurez bien eu des prix, mais je suis triste quand j’en reçois car, cela implique que je devrais me demander ce que le Seigneur me donnera comme force intérieure pour incarner les choses et ne pas decevoir toutes ces personnes qui me font confiance. Ne perdez jamais une chose en vous, votre enfance. Et cela Jack Simon qui fait partie des fondateurs de l’Actor Studio américain nous dit toujours, « si tu perds ton enfance, ne soit plus un artiste ».

C’est sur ces mots que nous nous quittons non sans nous laisser un mot
d’espoir pour le 7ème art ivoirien…

J’ai beaucoup d’espoir pour le cinéma ivoirien. J’ai beaucoup d’estime pour lui. Il y a de grands réalisateurs ici, mais on ne les voit pas en Europe. Je connais très peu de films ivoiriens qui ont eu des prix à Ouaga. Mais on ne fait pas toujours des films pour gagner des prix. Il faut aussi se dire que quand on va dans une bagarre, on doit gagner. On a la preuve dans une histoire de foot. J’ai pris plein de coup durant mon enfance. Il faut penser à ce proverbe chinois qui dit « c’est en essayant d’atteindre l’impossible qu’on atteint le possible ». Ne jamais chercher à atteindre le possible car, il est en dessous de l’impossible. Sans limite comme l’Océan. Le talent ne représente que 10% de la réussite il faut 80% de travail. Etre plein d’énergie à 75 ans comme moi et continuer.

Car si vous devenez trop sérieux, les enfants vous fuient. Picasso a dit qu’on met longtemps à devenir jeune. Et quand vous voyez cette pieuvre quand elle a pris de l’âge, c’est à des millions qu’elles se vendent. Et je finirai par dire comme Hampathé Ba, « trop sérieux , ce n’est plus sérieux ».

Entretien réalisé par Olivier Yro

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