
Depuis l’assassinat de Mouammar Kadhafi en octobre 2011, la Libye peine à retrouver une stabilité politique et sécuritaire durable. Quatorze ans plus tard, le pays demeure fracturé entre deux pôles de pouvoir concurrents : d’un côté, le Gouvernement d’union nationale basé à Tripoli, reconnu par les Nations unies, et de l’autre, les autorités de l’Est dominées par le Parlement de Tobrouk et soutenues par l’Armée nationale libyenne du maréchal Khalifa Haftar.
Cette dualité institutionnelle a nourri une insécurité chronique, marquée par l’émergence de milices, la prolifération des armes et la persistance de trafics transnationaux. Si certaines régions connaissent aujourd’hui une accalmie relative, la crainte d’un retour aux affrontements demeure omniprésente. Les infrastructures essentielles, déjà fragiles, restent exposées aux rivalités locales et aux ingérences extérieures.
Le processus politique, lui, s’apparente à un cycle sans fin. Chaque tentative de réconciliation ou de dialogue est suivie de nouvelles impasses. Les négociations conduites sous l’égide de l’ONU, qu’il s’agisse de la conférence de Berlin en 2020 ou des accords de Genève en 2021, ont permis d’éviter une guerre totale mais n’ont pas abouti à une unification effective des institutions. L’enjeu central reste le même : comment organiser des élections crédibles dans un pays où la souveraineté est fragmentée et où les postes régaliens sont source de tensions permanentes.
Cette semaine, un nouvel épisode s’ouvre avec les réunions annoncées entre le Parlement et le Conseil d’État. Les discussions devraient se concentrer sur deux priorités : l’organisation des élections générales, réclamées par la communauté internationale et la répartition des postes souverains, tels que la Banque centrale, la Cour des comptes ou encore la Commission électorale. Ces institutions, essentielles au fonctionnement de l’État, sont elles-mêmes divisées entre l’Est et l’Ouest, reflétant l’éclatement politique du pays.
Pour de nombreux observateurs, la question n’est pas seulement de savoir qui occupera ces fonctions, mais comment garantir que leur nomination ne devienne pas un nouvel outil de blocage. L’envoyé de l’ONU en Libye a d’ailleurs mis en garde contre une gestion unilatérale de ce dossier, estimant qu’il risque de repousser encore les échéances électorales.
À l’heure où la population libyenne aspire à une normalisation de sa vie quotidienne, le spectre de l’instabilité continue de planer. La paix durable dépendra moins des compromis ponctuels que d’une volonté commune des deux factions de dépasser les calculs immédiats pour reconstruire des institutions réellement inclusives. Reste à savoir si les discussions de Benghazi ouvriront enfin la voie à ce tournant tant attendu, ou si elles s’ajouteront à la longue liste des dialogues inachevés.











